Transmettre : traverser le temps et les générations

dimanche 19 juin 2022, par Véronique Leroux-Hugon

Transmettre : traverser le temps et les générations, Saint-Coulomb, novembre 2019, colloque organisé par l’association Psychologie et vieillissement, 198 p.

En quatre parties, scandées par les interventions du Quidam Théâtre, ce colloque a proposé les différentes déclinaisons du terme « transmettre » à travers les thèmes du récit de soi, des questions de lien et de mémoire, de la façon de transmettre entre et à travers les générations, à la retraite, ou encore du rôle du patient-expert dans le projet de vie d’un malade.

Les intervenants y ont transmis leurs expériences de psychanalystes, souvent lacaniens, de psychologues, de biographes hospitalières, en l’occurrence Valeria Milewski, que nous avons entendue à l’APA, d’un hypnothérapeute, par ailleurs ancien notaire, d’un patient formateur, ou de journalistes, participant à des associations comme Histoires ordinaires à Saint-Malo, avec une démarche comparable à celle de l’APA, que j’ai présentée.

L’affiche annonçant le colloque représentait une armoire ancienne ouverte d’où s’échappaient des objets significatifs, image très représentative de la générosité qui animait bien des intervenants dans leur pratique et dans leur souci de « faire passer ».

On se contentera ici de citer quelques-uns des titres significatifs des interventions, par exemple : les enjeux de la transmission, entre savoir et malentendu, ou transmettre du vertical à l’horizontal : comment nous sommes passées des certitudes aux questions partagées. Une évidence : la transmission est un point nodal de la structure familiale, y compris quand elle ne se fait pas, avec la notion de secret de famille ou celle de l’énigme que représente la sexualité parentale.

Martine Gruyère-Arnaud a exposé sa mission : « aider les parents à être parents », dans le cadre de l’École des parents, soulignant deux évolutions fondamentales : la mise en question de l’autorité paternelle et l’accroissement de la longévité, phénomènes sociologiques qui interfèrent avec la transmission.

Valeria Milewski souligne, quant à elle, « l’intime évidence [qu’elle doit] recueillir la vie de personnes gravement malades ».

Daniel Coum a fondé à Brest les Associations Parentel et Parent’âge, en aide à la parentalité, et affirme qu’il faut « trois générations pour faire un enfant », avec tout ce que cette remarque implique. Il déplore le délitement contemporain des solidarités familiales, et ses conséquences pour les aidants familiaux.

Nous étions à Saint-Malo, où l’histoire des Terre-Neuvas a toute son importance, ici illustrée par un documentaire, Mémoires de brume. Dans un tout autre domaine, Nicolas Lebettre a parlé de son expérience professionnelle de notaire : au-delà des termes abscons employés lors d’une succession, il a su exposer quel était son rôle : dire la loi, mais aussi et surtout aider les familles à passer le cap du deuil à travers l’héritage de biens matériels certes, mais aussi la transmission de l’immatériel, les valeurs, une culture, soulignant la place de chacun dans une fratrie, et concluant avec un bel idéalisme sur la nécessité de transmettre de l’amour.

La dernière partie s’intitulait : Transmettre, toute une histoire. Isabelle Donnio a souligné l’importance de la transmission lors de la transition activité professionnelle-retraite, une valeur que l’on néglige trop souvent. Elle fait part d’une très riche expérience professionnelle pour exposer ces questions. Gilles Lucas (« Quand les patients nous enseignent ») a exposé son expérience, fondamentale et novatrice, de patient-expert, devenu patient formateur… de médecins. Enfin Anne-Marie Drivet a évoqué l’association malouine « Histoires ordinaires », analysant les grandes lignes des 450 récits de vie que l’Association a réunis

Enfin les Quidams, « théâtreux » qui ponctuaient avec humour les sérieuses interventions en en reprenant le thème principal, faisaient en effet « rire et réfléchir aux tribulations de la vie ».

Marie-France Eveno-Gendrot a proposé un épilogue ouvert : il s’était agi dans ces journées chaleureuses de « tenter de transmettre sans imposer, et laisser place aux transgressions ».

Ce compte rendu trop rapide n’épuise pas les perspectives ouvertes de manière originale sur ce thème de la transmission.